La législation fiscale française connaîtra des modifications substantielles en 2025. Ces changements concernent principalement les obligations déclaratives des particuliers et s’inscrivent dans une démarche de modernisation du système fiscal. Les contribuables devront s’adapter à ces nouvelles exigences qui touchent plusieurs domaines : revenus, patrimoine, investissements et transactions numériques. La Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP) a dévoilé un calendrier précis pour la mise en œuvre de ces mesures qui visent à renforcer la transparence fiscale tout en simplifiant certaines démarches administratives. Ces évolutions s’accompagnent de nouveaux outils numériques et d’un dispositif d’accompagnement pour faciliter la transition.
Refonte du calendrier et des modalités déclaratives des revenus
L’année 2025 marque un tournant dans les procédures déclaratives des revenus pour les particuliers. La DGFiP a repensé le calendrier fiscal avec une harmonisation des dates limites de déclaration. Désormais, tous les contribuables, quel que soit leur département de résidence, devront soumettre leur déclaration avant le 15 juin. Cette uniformisation vise à faciliter le traitement administratif et à éviter les confusions liées aux différentes zones géographiques.
La déclaration automatique sera généralisée à davantage de foyers fiscaux. Cette extension concernera près de 70% des contribuables, contre 62% actuellement. Pour être éligible, le foyer fiscal ne doit pas avoir connu de changement de situation (mariage, divorce, naissance) et ses revenus doivent être intégralement connus de l’administration fiscale. Dans ce cas, le contribuable n’aura qu’à vérifier les informations pré-remplies sans action supplémentaire à effectuer.
Les revenus exceptionnels feront l’objet d’un traitement spécifique avec un formulaire dédié à compléter en annexe de la déclaration principale. Cette nouvelle disposition concerne notamment les indemnités de rupture de contrat, les primes exceptionnelles et certains revenus liés à des opérations immobilières. L’objectif est d’améliorer l’identification de ces revenus pour un calcul plus précis de l’impôt.
La déclaration des revenus étrangers connaîtra une refonte majeure avec l’entrée en vigueur de l’échange automatique d’informations entre administrations fiscales de 112 pays. Les contribuables percevant des revenus de source étrangère devront remplir un formulaire spécifique (n°2047-EXT) détaillant la nature, le montant et le pays source de ces revenus, même si ces derniers sont déjà pré-remplis grâce aux échanges internationaux. Cette mesure vise à lutter contre la fraude fiscale transfrontalière.
Pour les professions indépendantes et les micro-entrepreneurs, la déclaration sociale et fiscale sera unifiée sur un portail unique, simplifiant considérablement les démarches administratives. Ce guichet unique permettra de déclarer simultanément les revenus professionnels à l’administration fiscale et aux organismes sociaux, évitant ainsi les doubles saisies et les incohérences déclaratives.
Nouvelles obligations liées au patrimoine et aux biens immobiliers
Le régime de l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) connaîtra des ajustements significatifs en 2025. Le seuil de déclenchement de l’obligation déclarative sera maintenu à 1,3 million d’euros, mais de nouvelles règles d’évaluation des biens immobiliers seront appliquées. L’administration fiscale exigera désormais une méthode d’évaluation par comparaison avec au moins trois transactions similaires récentes dans le même secteur géographique. Cette méthodologie devra être documentée et jointe à la déclaration d’IFI.
Les résidences secondaires feront l’objet d’une attention particulière. Une nouvelle annexe à la déclaration de revenus devra détailler la période d’occupation personnelle, les périodes de location (le cas échéant) et le montant des charges supportées. Cette mesure s’inscrit dans le cadre de la lutte contre les résidences fictives et les abus liés aux avantages fiscaux des résidences secondaires dans certaines zones tendues.
La taxe d’habitation, bien que supprimée pour les résidences principales, reste applicable aux résidences secondaires avec des modifications importantes. Les communes situées en zone tendue pourront majorer cette taxe jusqu’à 60% (contre 50% précédemment). Les propriétaires devront déclarer l’usage de leurs biens immobiliers via un formulaire spécifique avant le 1er juillet 2025, sous peine d’une amende forfaitaire de 150 euros par bien non déclaré.
Les plus-values immobilières seront soumises à un nouveau régime déclaratif. Le formulaire 2048-IMM sera entièrement remanié pour intégrer le détail des travaux d’amélioration réalisés, avec obligation de fournir les justificatifs numérisés. L’exonération après 22 ans de détention pour l’impôt sur le revenu et 30 ans pour les prélèvements sociaux demeure, mais le calcul de l’abattement sera modifié avec une progressivité plus linéaire.
Concernant les biens détenus à l’étranger, l’obligation déclarative s’étend désormais aux droits réels immobiliers (usufruit, nue-propriété) et aux biens détenus via des structures juridiques étrangères transparentes fiscalement. Cette déclaration devra être effectuée via le formulaire n°3916 avant le 15 juin 2025, avec mention de la valeur vénale au 1er janvier 2025. Les sanctions pour non-déclaration seront renforcées, pouvant atteindre 80% des droits éludés.
Déclaration des comptes et placements financiers
L’obligation de déclarer les comptes bancaires étrangers sera étendue aux comptes de paiement électroniques et aux portefeuilles de cryptomonnaies détenus auprès de plateformes étrangères. Cette extension reflète l’évolution des pratiques financières et vise à maintenir l’équité fiscale entre détenteurs d’actifs traditionnels et numériques.
Obligations spécifiques pour les investissements et revenus du capital
Le régime du Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) à 30% sera reconduit en 2025, mais avec des modifications substantielles dans les modalités déclaratives. Les contribuables auront désormais la possibilité d’opter pour l’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu pour certaines catégories de revenus mobiliers tout en conservant le PFU pour d’autres. Cette option s’exercera ligne par ligne dans la déclaration de revenus, offrant une flexibilité fiscale inédite.
Les plus-values sur valeurs mobilières feront l’objet d’une déclaration plus détaillée. Le formulaire 2074 sera restructuré pour distinguer les plus-values selon la durée de détention des titres et selon leur nature (actions, obligations, parts sociales). Les contribuables devront préciser l’origine des titres (acquisition, donation, succession) et fournir un historique des opérations pour les titres acquis avant 2018.
Les dividendes et intérêts perçus feront l’objet d’un pré-remplissage plus complet grâce à l’obligation faite aux établissements financiers de transmettre ces informations à l’administration fiscale avant le 15 février 2025. Toutefois, le contribuable conserve la responsabilité de vérifier l’exactitude des montants pré-remplis et de les corriger le cas échéant. Une attention particulière devra être portée aux revenus de source étrangère qui pourraient ne pas être automatiquement intégrés.
Les Plans d’Épargne Retraite (PER) seront soumis à une nouvelle obligation déclarative annuelle, même en l’absence de retrait. Les titulaires devront déclarer la valeur de rachat au 31 décembre de l’année précédente ainsi que le montant des versements effectués durant l’année. Cette mesure vise à permettre un meilleur suivi de ces produits d’épargne dont le régime fiscal est particulièrement avantageux.
Pour les investissements défiscalisants (Pinel, Denormandie, LMNP, etc.), une annexe spécifique devra être jointe à la déclaration de revenus détaillant les caractéristiques du bien, les engagements pris et la période d’application de l’avantage fiscal. Cette obligation s’appliquera même aux investissements réalisés avant 2025 et encore dans leur période d’engagement. La non-production de ce document pourra entraîner la remise en cause de l’avantage fiscal.
- Documents à joindre pour les investissements défiscalisants : attestation du promoteur ou du vendeur, bail locatif, justificatif de respect des plafonds de loyers et de ressources du locataire
- Éléments à déclarer pour les PER : montant des versements déductibles, versements non déductibles, origine des fonds (épargne personnelle, transfert d’un autre produit)
Déclaration des actifs numériques et des revenus issus de l’économie collaborative
La fiscalité des cryptomonnaies connaît une évolution majeure avec la mise en place d’une déclaration spécifique pour les détenteurs d’actifs numériques. Tout contribuable possédant des cryptoactifs dont la valeur cumulée excède 5 000 euros devra les déclarer via un formulaire dédié (n°3916-bis), en précisant la nature des actifs, leur quantité et leur valeur estimée au 31 décembre 2024. Cette obligation s’applique indépendamment de toute transaction générant des plus-values.
Les plus-values de cession d’actifs numériques resteront imposées au taux forfaitaire de 30% (PFU), mais la méthode de calcul sera affinée. Le prix d’acquisition sera déterminé selon la méthode du prix moyen pondéré d’acquisition (PMPA) calculé pour chaque type d’actif numérique. Les contribuables devront tenir un registre chronologique des transactions et le conserver pendant six ans pour justifier le calcul des plus-values en cas de contrôle fiscal.
Les revenus issus du minage de cryptomonnaies seront désormais clairement catégorisés comme des bénéfices non commerciaux (BNC) ou des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) selon l’intensité de l’activité. Les mineurs devront déclarer les cryptomonnaies obtenues à leur valeur au jour de leur acquisition, même en l’absence de conversion en monnaie traditionnelle. Les frais d’électricité et d’équipement pourront être déduits sous certaines conditions.
L’économie collaborative sera soumise à un cadre déclaratif plus strict. Les plateformes en ligne (Airbnb, Uber, Blablacar, etc.) devront transmettre directement à l’administration fiscale un récapitulatif annuel des revenus perçus par chaque utilisateur dès le premier euro. Ces revenus seront pré-remplis dans la déclaration, mais le contribuable devra les vérifier et les ventiler selon leur nature (location meublée, prestation de service, vente de biens).
Le seuil d’exonération pour les revenus issus de la vente d’objets d’occasion entre particuliers sera maintenu à 5 000 euros annuels, mais avec une restriction : ce seuil ne s’appliquera plus aux ventes d’objets précieux (bijoux, œuvres d’art) ni aux objets achetés dans l’intention de les revendre. Les contribuables devront tenir un registre des achats et ventes pour justifier du caractère occasionnel de cette activité.
- Documents à conserver pour les transactions en cryptomonnaies : historique des transactions (date, nature, montant), justificatifs des frais d’acquisition, preuve de la valeur des cryptoactifs aux dates d’acquisition et de cession
Dispositifs d’accompagnement et sanctions en cas de non-conformité
Face à la complexité croissante des obligations déclaratives, l’administration fiscale déploiera en 2025 un dispositif d’accompagnement renforcé. Un assistant virtuel doté d’intelligence artificielle sera intégré à l’espace particulier sur impots.gouv.fr pour guider les contribuables dans leurs démarches. Ce système analysera la situation personnelle du déclarant pour lui proposer une aide contextualisée et l’alerter sur d’éventuelles incohérences avant validation de sa déclaration.
Des permanences physiques seront organisées dans les centres des finances publiques et dans certaines mairies durant la période déclarative. Un système de prise de rendez-vous en ligne permettra d’éviter les files d’attente et d’optimiser le temps de consultation. Des agents spécialisés seront formés spécifiquement sur les nouvelles obligations pour répondre aux questions les plus techniques.
Le régime des sanctions applicable en cas de manquement aux obligations déclaratives sera révisé. L’administration adoptera une approche graduée selon la nature et la gravité du manquement :
Pour les omissions simples sans intention frauduleuse, une majoration de 10% sera appliquée sur les droits supplémentaires, contre 40% précédemment. Cette réduction vise à encourager la régularisation spontanée des situations. Un délai de régularisation de 30 jours sera accordé après notification par l’administration avant application de toute pénalité.
En revanche, les manquements délibérés seront plus sévèrement sanctionnés. La majoration passera de 40% à 50% pour les omissions volontaires et pourra atteindre 80% en cas de manœuvres frauduleuses. Les sanctions pénales pour fraude fiscale seront maintenues avec des peines pouvant aller jusqu’à 500 000 euros d’amende et 5 ans d’emprisonnement.
Un droit à l’erreur élargi sera mis en place pour les primo-déclarants et pour les situations complexes liées à un changement de situation personnelle (divorce, succession, expatriation). Ce dispositif permettra de corriger sa déclaration sans pénalité pendant six mois après la date limite de dépôt, contre trois mois actuellement.
La prescription fiscale reste fixée à trois ans pour les contrôles ordinaires, mais sera portée à dix ans pour les avoirs non déclarés détenus à l’étranger et les activités occultes. L’administration disposera désormais de moyens d’investigation renforcés, notamment l’accès aux données des réseaux sociaux et des plateformes en ligne pour détecter les incohérences entre le train de vie affiché et les revenus déclarés.
Transformation numérique de la relation avec l’administration fiscale
L’année 2025 consacre la dématérialisation totale des échanges avec l’administration fiscale. La déclaration papier ne sera plus proposée, sauf pour les contribuables justifiant ne pas avoir accès à internet ou être dans l’incapacité de l’utiliser. Cette transition numérique s’accompagne d’une refonte complète de l’interface du site impots.gouv.fr et de l’application mobile « Impots.gouv ».
L’application mobile offrira de nouvelles fonctionnalités, notamment la possibilité de scanner des documents justificatifs pour les joindre directement à la déclaration. Un système de notification personnalisée alertera les contribuables des échéances à venir et des actions à réaliser. L’historique fiscal sera accessible sur dix ans contre trois actuellement, facilitant les comparaisons pluriannuelles.
La signature électronique des déclarations sera renforcée avec l’introduction d’un système d’authentification à double facteur. Les contribuables devront valider leur déclaration par un code reçu sur leur téléphone mobile ou via une application d’authentification. Cette mesure vise à sécuriser davantage les échanges et à prévenir les usurpations d’identité.
Un coffre-fort numérique fiscal sera mis à disposition de chaque contribuable pour conserver l’ensemble des justificatifs liés à sa situation fiscale. Ce service garantira l’intégrité et la confidentialité des documents pendant la durée légale de conservation, tout en les rendant facilement accessibles en cas de contrôle. Les documents déposés dans ce coffre-fort seront horodatés et certifiés, leur conférant une valeur probante.
Enfin, un tableau de bord fiscal personnalisé permettra à chaque contribuable de visualiser l’ensemble de sa situation (revenus déclarés, impôts payés, crédits d’impôt, échéanciers) et de réaliser des simulations en temps réel. Ce dispositif s’inscrit dans une démarche de transparence et de pédagogie fiscale, visant à rendre le contribuable plus autonome dans la gestion de ses obligations.
